CEP--Kisantu

RDC : Agriculture familiale durable

Appui aux processus d’innovation paysanne et d’évaluation collectives des pratiques agricoles – Pour une agriculture familiale durable, viable et intégrée

Au sein du territoire de Madimba, notre partenaire de longue date – le BDD-CCDS – met en place des activités d’appui aux ménages ruraux, à travers les CODEV (comités de développement villageois). Ces dernières années, les activités se sont particulièrement penchées sur la mise en évidence de modalités d’agriculture familiale durables et viables, dans un contexte de très forte pression sur les terres et les ressources naturelles.

Les interventions visent aussi spécifiquement le soutien aux activités gérées par les femmes, ainsi que l’éducation professionnelle des jeunes.

Contexte

Le territoire de Madimba, où se trouve la ville de Kisantu qui abrite les bureaux de notre partenaire, s’étend le long de la route nationale 1 reliant la capitale aux ports de Matadi et Boma. Situés à seulement une centaine de kilomètres de Kinshasa – et entre 2 et 6 heures de route selon l’état du trafic ! – les agriculteurs de Madimba en subissent la pression, avec les besoins alimentaires grandissant de cette métropole de plus de 14 millions d’habitants.

Comme ailleurs en RDC, la gestion durable des terres est menacée par un ensemble de facteurs sociologiques, économiques et environnementaux, qui s’articulent aux pratiques agricoles :

  • La croissance démographique et les problèmes liés à la superposition du droit coutumier (« ayant droit » administrant traditionnellement l’octroi et l’usage des terres) et du droit civil occidental (titres de propriété) est accrue du fait de la proximité avec la ville et ses hommes d’affaire.
  • À cela, on peut ajouter que les pratiques agricoles (cultures de manioc sur brulis) sont à la fois de moins en moins productives, et ne permettent pas non plus une régénération des terres déjà fortement déforestées et surexploitées. La faible disponibilité des facteurs de production principaux (terres, capital et main d’œuvre) pousse cependant les paysans à privilégier ces systèmes de culture et de fertilisation (cendres de l’écobuage) peu intensif en intrants.
  • Finalement, les activités agricoles sont principalement vues comme des activités de subsistance et de sécurité alimentaire, rarement comme une activité économique à part entière. Malgré un potentiel de production immense, cette dynamique empêche souvent les activités de production et de transformation de dégager un profit répondant aux besoins des ménages.

La combinaison de ces paramètres abouti à un dramatique appauvrissement des terres, qui menace de façon directe et immédiate les revenus agricoles des paysans et leurs moyens de survie, mais impacte également sur le moyen terme les écosystèmes et leurs services qui soutiennent les activités humaines et permettent la vie en général (fertilité des sols, régulation du climat local, stockage et disponibilité en eau, etc.).

Objectifs

L’objectif de ce projet d’appui aux agriculteurs familiaux est de contribuer au développement et à la co-construction de modèles agricoles durables et viables, adaptées aux contextes et systèmes de contraintes spécifiques des paysans – et qui permettront à la fois d’améliorer leurs conditions de production et leurs rendements, tout en préservant voire en restaurant les services environnementaux nécessaires à la résilience des populations et au développement local.

Les hypothèses qui sous-tendent ce projet sont les suivantes :

  1. Il existe des modalités de production basées sur la valorisation des processus naturels (agriculture de conservation, gestion intégrée de la fertilité des sols, utilisation d’intrants naturels et locaux, associations diverses y compris agroforesterie…), qui peuvent à la fois conduire à des impacts directs sur les revenus paysans, et renforcer la durabilité des agroécosystèmes
  2. Cet ensemble de pratiques représente cependant un changement important au sein des systèmes de production, et dont les déterminants et les impacts sont ancrés de façon multidimensionnelle au sein des terroirs (contextes fonciers, systèmes de culture, facteurs de production, environnement culturel, formation et information disponible, accès aux intrants, dynamiques collectives, etc.)
  3. Pour répondre à cette problématique complexe et contribuer à lever les freins à la transition agroécologique, les projets doivent prendre en compte les contextes spécifiques des parties prenantes, et proposer des solutions techniques qui s’intègrent dans les systèmes de contraintes (biophysiques, économiques et sociales) et peuvent être adaptés collectivement. Les espaces d’échanges, négociations et concertation sont également essentiels afin de permettre une évolution des stratégies d’appui en fonction de leur pertinence évaluée.

L’enjeu majeur est donc de mettre en place les conditions nécessaires à l’innovation paysanne et à l’identification, l’expérimentation, l’évaluation et l’adaptation de pratiques durables et viables, pertinentes et adaptées aux contextes, et dès lors capables de susciter adoption, diffusion et intégration au sein des agrosystèmes.

Actions et impacts attendus

Concrètement, les actions du projet mis en place par le CCDS s’articulent sur trois niveaux :

L’appui au développement du centre CEDITA pour les jeunes agri-entrepreneurs issus des milieux ruraux du territoire de Madimba

Ce centre porte une triple mission de formation des élèves sur un cycle de 3 ans ; d’expérimentation et évaluation des pratiques agricoles porteuses ; et d’appui aux initiatives d’entreprenariat rural durable (projets des élèves et AGR de groupes de femmes de la région).

Des essais agronomiques sont conduits et alimentent les champs-écoles et les actions dans les villages, notamment via des formations au champs, une ouverture aux partenariats (mémorants, écoles d’agriculture, centres de recherche…) et de nombreuses visites d’échanges et journées portes-ouvertes. Les thèmes de recherche identifiés collectivement concernent la gestion durable de la fertilité des sols, la lutte contre les bioagresseurs et la diversification des cultures.

De plus la formation des élèves tend à se baser sur des méthodes de pédagogie active, en intégrant les espaces d’expérimentation au sein des cours, pour associer théorie et pratique. Un appui à l’installation par l’accès à la terre et autres moyens de démarrage devraient être apporté au terme de leur formation. Ces jeunes constitueront ainsi une pépinière valorisante pour la continuité de la profession agricole.

L’appui à la sécurisation des espaces de champs-écoles paysans (CEP), à leur fonctionnement et aux dynamiques d’animation autour des essais menés

Ces espaces de production sécurisés au sein des villages permettent de réunir les paysans locaux, les animateurs et un ou plusieurs agronomes afin de renforcer les capacités des agriculteurs à identifier les contraintes de leurs modalités de production, et à choisir, tester et évaluer les solutions les plus adaptées.
Un cycle d’apprentissage collectif est ainsi mis en place sur base des problématiques et ambitions identifiées participativement au sein du groupe (sur la fertilisation des cultures, la gestion des ravageurs, l’accès aux intrants, la pénibilité au travail, etc.), et s’appuie sur un dispositif d’expérimentation partagé et animé par un technicien, sur base notamment des essais menés au sein du centre CEDITA.
Chaque ménage membre du CEP a accès à une parcelle individuelle et sécurisée sur plusieurs années dans le champs-école, où il peut mettre en place les pratiques qui lui ont semblé les plus porteuses au sein des dispositifs expérimentaux. Avec l’appui des animateurs, les observations faites sur l’intégration de ces pratiques dans la parcelle individuelle sont compilées et échangées, afin d’alimenter le prochain cycle d’apprentissage.

L’appui matériel, logistique et en (in)formation aux paysans membres des CODEV ciblés par notre partenaire

À un niveau plus élargi en dehors des CEP, l’appui du CCDS dans les villages associés au projet comprend également des formations techniques et la participation à des visites d’échanges, ainsi que des appuis matériel et logistique en fonction des besoins identifiés lors des diagnostics et concertations. Il peut s’agir d’un appui à la structuration des organisations paysannes et à leur insertion au sein des fédérations provinciales, ou encore aux processus de sécurisation foncière et de résolution des conflits ; tout comme d’un appui aux systèmes d’information sur les marchés (SIM) et à la diversification des cultures (avec des apports matériels ponctuels notamment en outils aratoires, semences ou noyaux reproducteurs pour le développement de l’élevage). Par ailleurs, des initiatives de reboisement sont appuyées chez les paysans volontaires.

Poster sur les Champs École Paysan (CEP)

Partenaires

Ce projet est mis en place par notre partenaire, le Bureau Diocésain de Développement (dit BDD) au sein de la Coordination Caritas Développement Santé (dit CCDS) de Kisantu.

 

Équipe

Un appui stratégique de proximité est apporté par notre équipe de chargés de projets du bureau de Mbanza Ngungu au niveau du processus de transition vers des approches intégrées et des dynamiques participatives – encore peu connues dans la région.

C’est notamment notre expert en « approches CEP », Laurent Kikeba, qui est chargé d’appuyer les agronomes et animateurs du CCDS dans la mise en place des dynamiques d’animation et de recherche-action. Une « formation des formateurs » a ainsi été lancée en faveur de l’équipe du BDD-CCDS et étalées sur une saison, au sein d’un « CEP des formateurs », en situation (presque) réelle donc ! Le contenu de ces formations est axé sur l’identification participative des thèmes d’étude, l’installation des dispositifs d’expérimentation, la collecte et l’analyse des données, la facilitation des animations et échanges, et le suivi et l’évaluation du processus d’apprentissage. Les animateurs ainsi formés travaillent ensuite avec les producteurs lors de séances communes avec les agronomes après chaque séance de formation hebdomadaire.

Financement

Logo DGD

Budget

693.389 €

Jan 2017 – déc 2021

Personnes de contact : Ernest MUANDA et Florian DELESPESSE

En quelques images

Nos témoignages