Joséfa Ernest
30/06/21

Entretien croisé RDC-Burkina

En mai, notre collègue Florian Delespesse organisait une mission conjointe de plusieurs chargés de projet de l’ONG, travaillant dans des domaines connexes, mais dans des pays différents. Pourquoi ? Pour identifier les complémentarités et polliniser réciproquement nos projets ! Extraits d’entretien croisé avec Joséfa Zagué-Somé, coordinatrice de notre bureau burkinabé et Ernest Muanda, responsable du projet apicole au Kongo central…

– Joséfa, quel est votre travail ?

Je suis la coordinatrice d’ULB-Coopération au Burkina Faso, basée à Ouagadougou. Je suis également chargée des projets en hydraulique, en agroécologie et en santé. Je coordonne toutes les actions que l’on mène sur le terrain et toutes les activités mises en place par les partenaires Natudev, Impulsion et APAF.

-Ernest, et vous ?

Je suis assistant technique du volet agro-environnemental de l’ONG, en RDC. Notre bureau est attaché à la coordination de Kinshasa et les activités agro-environnementales sont implantées au Kongo Central. Nous travaillons dans une approche indirecte, passant par notre partenaire CCDS pour ce qui relève de l’agroécologie. Pour nos activités de soutien à l’apiculture, notre approche est en direct avec les bénéficiaires, et se déploie autour de la réserve de biosphère de Luki. Je cordonne l’équipe et les partenaires qui travaillent dans ce domaine.

– Quels sont les points communs découverts lors de cette mission conjointe ?

E : En termes de contenu, nous partageons des thématiques : l’agroécologie, l’apiculture, les produits forestiers non ligneux de manière plus générales et le souci de développer des filières au bénéfice des paysannes et des paysans.

– Quelles sont les complémentarités que vous avez identifiées ?

J : Cette mission croisée entre collègues de différents pays du Sud est une première dans les domaines de l’agroécologie et de l’apiculture. Elle nous permet de comprendre nos approches respectives, d’identifier les forces spécifiques au sein de nos équipes. Par exemple, nous disposons de connaissances sur la méliponiculture au Burkina, bien que les projets n’aient pas encore commencé, et cet aspect intéresse nos collègues en RDC. Nous pourrons donc avancer ensemble. Au Burkina, l’ONG dispose d’une longue expérience en gestion des territoires et des ressources, qui sera utilement partagée avec le Congo. Dans des domaines plus spécifiques comme la transformation ou la commercialisation de produits forestiers non ligneux, nous pourrons partager nos leçons apprises pour que les projets en RDC en bénéficient. En termes de fonctionnement des structures ou de relations partenariales, nous avons également échangé des bonnes pratiques, qui permettront de renforcer l’action de chacun des bureaux.

E : Les innovations que nous testons sont un beau sujet d’échange également, et ce sera certainement le cas autour de la méliponiculture. Bien sûr, les contextes sont différents : le climat, l’environnement, le fonctionnement administratif, etc. Mais cela permet de réfléchir aux transpositions et adaptations. Dans un tout autre domaine, la présence de Joséfa a souligné combien l’équipe du Kongo central était masculine… C’est aussi une piste d’amélioration : nous devons veiller à attirer les candidates et les intégrer à notre équipe.

– En quoi ces échanges peuvent être bénéfiques pour les communautés ?

J : Constater le fonctionnement de l’équipe en RDC indique l’importance d’étoffer en très bonnes compétences toutes les équipes de projet. Une équipe compétente et en nombre suffisant se place en soutien des partenaires, au service des bénéficiaires ; elle concrétise plus d’actions sur le terrain, réfléchit mieux pour avoir le plus d’impact possible.

E : Concrètement, développer l’aspect transformation des fruits, que l’on ne fait pas encore dans nos projets en RDC, serait réellement utile aux populations. Les fruits poussent abondamment ici, mais la filière n’est pas suffisamment développée et dans ce domaine, le regard de nos collègues du Burkina sera utile. Pour revenir aux aspects climatiques, nous avons réalisé que nous sommes, au Kongo central, dans une région clémente. Quand on entend de nos collègues du Burkina que les populations ne disposent que de deux mois de pluie par an, et que malgré cela ils cultivent, ça nous fait tous réfléchir ! Ici, on commence à observer des périodes de pluie plus courtes et nous avons donc découvert quelques moyens pour s’adapter, des techniques culturales du Burkina qui nous serviront d’exemple.

J : Toujours dans la question de l’intérêt pour les communautés, les ménages, je constate que les populations semblent utiliser moins de produits chimiques en RDC comparé au Burkina, où nos sols s’appauvrissent vraiment. C’est un peu technique, mais la valorisation des plantes fertilitaires par enfouissement, en cours au CEDITA, est une méthode à investiguer pour nous ! Actuellement, nous préconisons les biopesticides, les biofertilisants mais tout le monde n’a pas la capacité d’acheter ces produits. Là, c’est une leçon apprise à explorer : creuser et enfouir !

Les pistes de collaboration sont donc lancées, ces premières rencontres ont permis à chacun, à chacune de mieux comprendre les réalités respectives, les enjeux, les défis. Et, tout simplement, de mettre un visage sur un nom dans un organigramme, ce qui facilite grandement tout échange futur !