Burundi Banner
10/05/17

Success story au Burundi : histoire d’un désengagement réussi

Dans les années 1970, le Burundi a mis en place des centres semenciers répartis à travers tout le pays afin de diffuser des semences de qualité en quantité. Depuis lors, le pays a traversé de multiples crises dont la guerre civile qui a débuté en 1993 et s’est atténuée en 2001 avec la conclusion des accords d’Arusha.

Malgré ces accords, le pays a encore vécu des troubles dont les « événement de 2006 ». Ceux-ci ont causé, entre autres, la quasi-destruction du centre semencier de Ruzibazi, perché à 2.200 m d’altitude dans la commune de Mukike (Province Bujumbura rural) qui fournissait 22.000 habitants en semences de première génération.

En 2007, Monsieur Julien Nahayo, ancien ambassadeur du Burundi (devenu membre de notre Assemblée générale), nous avait alerté du fait que privés de ce centre semencier, les paysans des alentours étaient confrontés à une agriculture ne fournissant que du blé, du maïs et des pommes de terre de mauvaise qualité et en faible quantité, accentuant la pauvreté et les carences ali- mentaires. Dès 2008, avec le soutien de la Coopération belge et de nos donateurs (dont les Rotary de la Région bruxelloise), nous avons entrepris de restaurer ce centre semencier, qui est l’un des quatre centres semenciers essentiel du Burundi, en partenariat avec le Direction Provinciale de l’Agriculture et de l’Elevage.

La mise en œuvre de ce projet est devenue une réelle « success story ». Tout en restaurant le centre, les paysans ont été formés aux techniques de multiplication des semences puis aux techniques d’analyse avant récolte et durant la conservation. Ils ont créé leur « Fédération des Organisations de Producteurs Agricoles de Mukike » (FOPAMU), et obtenu une certification officielle de producteur de semences de qualité reconnue. La fédération couvre 18 ha de champs de cultures pour plusieurs variétés de semences, des champs fourragers pour le cheptel produisant la fumure organique, des boisements pour lutter contre l’érosion des sols. Elle commence à maîtriser la chaine de valeur de la production à la commercialisation. De plus, elle a acquis une capacité de plaidoyer, une volonté de faire reconnaître ses droits, de négocier avec des privés, de demander et obtenir des crédits. Des formations en « genre » ont été prodiguées et ont permis aux femmes d’être mieux reconnues pour leur travail au sein de leur communauté.

En quelques années, grâce à cet accompagnement, les résultats se sont réellement répercutés sur les conditions de vie de la population : accès à une meilleure alimentation et amélioration des revenus, de la santé, de l’habitat, du taux de scolarisation… Ces améliorations sont visibles et ont également fait l’objet d’une évaluation externe d’impact.

C’est alors que surgit une question cruciale dans notre métier : accompagner les producteurs, jusqu’où, jusqu’à quand ? Il reste toujours à faire pour pérenniser les acquis, surtout au vu des dérèglements climatiques (sécheresses, inondations, maladies phytosanitaires, survenues de grêles…) entrainant des dégâts en termes de rendements et d’environnement. Mais il nous faut aussi nous résoudre aux contraintes budgétaires et croire en l’avenir. Notre accompagnement technique et financier au centre semencier de Ruzibazi et à la FOPAMU s’est achevé le 31 décembre 2016. L’année 2017 sera leur « stress test ». Les membres de la fédération étaient informés depuis 2 ans et ont anticipé la fin de notre soutien en l’intégrant dans leur plan de développement stratégique. Gageons que tous en ressortiront plus forts. De notre côté, nous poursuivons la réflexion sur ce type de centres car ils sont appelés à évoluer : actuellement géré par des pouvoirs publics fragiles, une option serait de remettre la gestion du centre semencier du Ruzibazi directement à la FOPAMU qui agirait comme acteur privé agréé issu de l’agriculture familiale…