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13/01/23

Agir dans et autour des aires protégées en RDC

POURQUOI ET COMMENT ?

Les aires protégées en République démocratique du Congo sont parmi les plus riches et les plus diversi­fiées de la planète. De nombreuses espèces animales et plantes s’y retrouvent dans une biodiversité d’une extrême richesse et dans des paysages impression­nants. Les 9 Parcs Nationaux et 63 domaines de chasse gérés par notre partenaire l’ICCN représentent plus de 10 % du territoire national ! À cela, il faut ajouter les 2 Réserves de Biosphère classées auprès de l’UNESCO, dont celle de Luki avec laquelle nous travaillons. Ces aires protégées font face à des défis importants, tant à cause d’enjeux globaux comme le dérèglement clima­tique, ou d’enjeux locaux liés aux populations impor­tantes habitant en périphérie de ces zones.

POURQUOI ?

Si les gestionnaires des aires protégées se concentrent sur les objectifs de conservation de l’environnement dans les limites de leurs parcs nationaux, le besoin d’impliquer les communautés environnantes est devenu une stratégie assumée depuis de nombreuses années. En effet, la plupart des pressions sur les ressources naturelles sont le fait de populations vivant des services écosystémiques offerts par ces refuges de biodiversité. Impliquer les populations dans une gestion intégrée des territoires est donc crucial pour garantir une durabilité qui respecte tant les besoins actuels des communautés, que ceux des futures générations.

Notre mandat s’inscrit dans ce cadre : nous accompa­gnons ces communautés et les aires protégées pour développer des plans de gestion et des actions visant à réconcilier ces objectifs.

À travers les activités que nous menons dans les aires protégées, nous contribuons à :

  • Reboiser durablement des forêts continentales et des mangroves ;
  • Diminuer la pression anthropique sur les res­sources en soutenant les communautés dans et autour de l’aire pour développer des activités éco­nomiques alternatives ;
  • Consolider les capacités des acteurs·trices en matière de respect de l’environnement ;
  • Produire et diffuser de la connaissance sur les théma­tiques telles que l’agriculture durable, l’apiculture, etc.

2 AIRES PROTÉGÉES CIBLÉES

               1.  Le Parc Marin des Mangroves (PMM)

Le PMM est un parc national de ROC situé à proxi­mité de la localité de Moanda, d’une superficie de 76.000 ha, dont 20 % sont situés dans l’océan Atlantique. Le PM M est constitué d’importantes zones côtières (marines et fluviales) et insulaires (fluviales) de mangroves à palétuviers, abritant une riche biodi­versité (lamantins, tortues de mer, etc.).

Depuis de nombreuses années, des surfaces impor­tantes y sont déboisées illégalement, particulièrement parce que le bois de palétuvier est dense, et qu’il produit donc un charbon de bois (makala) offrant une chaleur de combustion importante.

En collaboration avec l’Institut Congolais de Conser­vation de la Nature (ICCN), nous organisons des opérations de reboisement durant les mois propices (novembre à février), qui se déroulent en 5 étapes :

  • Identification des zones à reboiser : nous car­tographions les zones à reboiser et les référençons grâce à l’appui technique fourni par nos collègues do terrain et aux systèmes d’information géogra­phique (SIG) permettant un ciblage précis.
  • Plantation par les communautés : des plan­teurs et planteuses recruté·es dans les commu­nautés locales dans et autour du PMM repiquent les plants d’arbres. Ce sont principalement des communautés de pêcheurs, qui disposent d’une bonne connaissance de la zone.
  • Récolte : les graines de palétuviers germent sur l’arbre-mère, pour ensuite se détacher quand elles ont déjà développé des racines suffisantes. Les récolteurs·euses les ramassent alors à ce moment précis, jusqu’à une centaine par jour.
  • Plantation : les plantules sont ensuite plantées dans la vase, à marée basse. C’est donc par deux tranches de 2h que les planteurs·euses peuvent tra­vailler chaque jour. Outre les espèces de palétuviers (Rhizophora ssp), nous reboisons aussi avec des fougères des mangroves (Acrostichum aureum).
  • Suivi : les écogardes du PMM effectuent un suivi régulier, crucial pour protéger les nouvelles plan­tations. Une évaluation du taux de survie est aussi réalisée, grâce aux données SIG et aux protocoles de suivi mis en place.

            2.    Le Jardin Botanique mellifère de Luki & pépinières

La réserve de biosphère de Luki couvre aujourd’hui 33.000 ha et constitue la relique la plus méridionale du massif forestier du Mayombe-ancienne forêt équato­riale s’étendant du Gabon à la RDC !

Autour de la réserve, nous avons couplé le développe­ ment de la filière apicale à la création d’une approche innovante d’agroforesterie communautaire. Les pra­tiques d’agroforesterie consistent à associer des arbres (dans ce cas-ci avec des arbres mellifères ou fruitiers) aux systèmes agricoles pour améliorer le rendement. La dimension communautaire, elle, provient du fait que les terres sont sécurisées collectivement, que les pépinières sont gérées par l’association d’apiculteurs et que les opérations de reboisement ou d’entretien des arbres se déroulent de manière collective. Si la filière permet d’augmenter considérablement les revenus des api­culteur·trices, un résultat positif connexe majeur se trouve dans le reboisement que l’apiculture induit.

De fait, lorsque les apiculteur·trices maîtrisent la ges­tion de la ruche, iels prennent rapidement conscience de l’importance de la flore mellifère. C’est évi­demment le pollen et le nectar de cette dernière qui auront un impact sur le rendement de la ruche, et donc, sur leurs revenus. Notre accompagnement des apiculteur·trices se situe donc dans les techniques de production, dans la gestion de la flore mellifère et l’agroforesterie communautaire.

Pour cet aspect, c’est grâce au partenariat avec l’INERA (l’Institut National pour l’Étude et la Recherche Agrono­miques) que nous avons pu créer le Jardin Botanique Mellifère de Luki. Il s’étend aujourd’hui sur près de 36 ha, et le projet 2022-2026 va nous permettre de continuer à reboiser pour atteindre les 100 ha. Il remplit plusieurs rôles :

  • Améliorer les connaissances scientifiques sur la flore mellifère endémique et répertorier les essences disponibles ;
  • Multiplier les arbres grâce à la pépinière centrale qui produit plants et semences ;
  • Approvisionner les pépinières locales (dites« décentralisées ») en plants et semences et accompagner les pépiniéristes dans la gestion de ces pépinières.

ULB-Coopération accompagne les communautés tant dans la gestion de ces pépinières, que dans la planification des opérations de reboisement. Ces dernières se font par et dans les communautés sur des terres sécurisées par les diverses associations d’apiculteur·trices. Le choix des essences du reboise­ment est réalisé sur base d’un diagnostic préalable complet, qui analyse le milieu, ses caractéristiques, la présence ou l’absence de certaines espèces… Cette manière de travailler permet de s’assurer que les communautés soient actrices et premières bénéficiaires du reboisement. Elles voient donc tout l’intérêt à protéger la flore sur le long terme.